Séminaires de lecture sur le nouveau matérialisme

Séminaires de lecture sur le nouveau matérialisme

À partir de janvier 2023, Mycélium vous propose de prendre part à cinq séminaires de lecture sur le nouveau matérialisme, pour nourrir et mettre en débat nos horizons philosophiques et politiques, nos imaginaires et nos manières de voir le monde, à partir de lectures communes. Ces séminaires seront animés par Marc Decitre, militant et diplômé en histoire environnementale, et sont à destination de tous.tes celleux ayant le goût de la lecture et de la discussion. À chaque séance, les concepts seront décortiqués et le contenu sera rendu le plus accessible possible.

Ces séminaires demanderont cependant un peu de travail de lecture (souvent en anglais) en amont et nécessitent une certaine régularité. Nous vous conseillons donc d’envisager un minimum d’assiduité (venir au moins trois fois) dans le cas où vous vous inscrivez. Les lectures seront commentées et discutées en français durant les séances.

Les séances auront lieu à Bruxelles à la Maison de la Paix, au 35 rue Van Elewyck à Ixelles, entre 13h et 17h :

  • vendredi 27 janvier
  • vendredi 10 et 24 février
  • vendredi 10 et 24 mars

Nous vous proposons de nous rejoindre dès 12h pour déjeuner ensemble !

Inscrivez-vous dès maintenant en envoyant un mail à delphine@mycelium.cc

La lutte contre les rapports de dominations et la poursuite d’une justice sociale sont rarement compatibles, croit-on, avec le désir de se rendre sensible aux autres qu’humains, à ces autres manières d’être et de voir le monde. Comment rendre féconde cette double poursuite ? Ces questions ne sont pas neuves et irriguent les mouvements écologistes depuis les années 70 et 80.

D’un côté, les « verts holistes » et les défenseurs d’une écologie profonde prônaient l’importance d’une ontologie relationnelle : une vision du monde basée sur les relations d’interdépendance entre les êtres et les processus perpétuels de transformation qui les traversent (on pense à Arnae Naess, Fritjof Capra, Charlene Spretnak, Caroline Merchant, Thomas Berry, David Abram).

D’un autre côté, les verts « de gauche » et les précurseurs de l’écologie politique réactualisaient la critique du patriarcat, du capitalisme et de l’impérialisme à partir de leur caractère aliénant et écologiquement désastreux (Ivan Illich, André Gorz, Barry Commoner, Murray Bookchin, Ynestra King).

Alors que la première vision devait servir en quelque sorte de « contre-poison » à la vision mécaniciste et désenchantée du vivant ; l’autre entamait un travail d’organisation programmatique, faisant apparaître les rapports de force contre lesquels se battre.

Ces deux visions n’ont pas pu converger, pour ainsi dire, jusqu’à aujourd’hui. En effet, les verts holistes reprochaient aux verts « de gauche » de rester prisonniers des carcans de la pensée des lumières – de reproduire l’imaginaire d’une exceptionnalité humaine vis-à-vis des vivants, et d’être trop centrés sur la conflictualité. Alors que les verts de gauche reprochaient aux holistes leur absence de prise en compte de la question des rapports de forces et des asymétries de pouvoir, qui les condamnaient à rester de doux rêveurs politiquement inefficaces.

Comment dépasser ces clivages, alors qu’ils se rejouent dans le débat autour des « nouvelles pensées du vivants » (Bruno Latour, Vinciane Desprets, Baptiste Morizot) ?

En effet, les auteur.ices ont changé, mais la question reste la même. Cette tension travaille l’écosystème Mycélium dès ses débuts et nous semble féconde. Elle l’est tout autant pour les auteur.ices « néo-matérialistes », provenant essentiellement du monde anglophone, et dont l’ambition est, pour elleux aussi, de chercher à dépasser les dualismes corps/esprit, sujet/objet, nature/culture, humain/non-humain, et de reconnaître la vitalité inhérente à la matière. En somme, ce courant de pensée porte la vision d’une ontologie relationnelle, tout en croisant sa promesse avec des lectures féministes, post-Marxistes, et décoloniales.

L’invitation de cet espace de lecture est donc de se glisser ensemble dans cette nébuleuse, et de nous laisser traverser par ses propositions. D’élaborer ensemble des pistes pour les « faire atterrir », ici et maintenant, dans nos engagements situés. Il s’adresse à toute personne désireuse de se nourrir de nouvelles manières de sentir-penser notre lien au vivant et de les articuler à un projet politique d’émancipation. Nous chercherons ainsi un équilibre entre textes sources plus théoriques (Karen Barad, William Connolly), des écrits de passeurs entre les mondes académiques et militants (Bayo Akomolafe, Vanessa Machado de Oliveira, adrienne maree brown), et des propositions militantes très concrètes de manier ces nouveaux imaginaires sur des enjeux spécifiques (Culture Hack Labs, Alnoor Ladha). Des propositions plus artistiques nous accompagneront aussi au fil des découvertes.

L’intention est de se retrouver, un vendredi sur deux, autour de plusieurs textes, organisés en trois « sous-nébuleuses » :

Première sous-nébuleuse : le « réalisme agentiel » de Karen Barad et ses reprises

  • Karen Barad – A la rencontre de l’univers – La physique quantique et l’enchevêtrement matière-signification (2007)
  • Divers articles de Bayo Akomolafe, dont “Perverse particles, entangled monsters and psychedelic pilgrimages : Emergence as an onto-epistemology of not-knowing”
  • Divers publications de Culture Hack Labs – un collectif de recherche sur le lien entre luttes pour la justice et la transformation des imaginaires – notamment leurs dossiers sur la question des communs https://www.culturehack.io/issues/issue-02-territories-of-transition/
  • Alnoor Ladha – Post-Capitalist Philanthropy: Healing Wealth in a Time of Collapse

Deuxième sous-nébuleuse : le « kinship worldview » – perspectives indigènes et décoloniales

  • Vanessa Machado de Oliveira- Hospicing Modernity
  • Darcia Narváez, Wahinkpe Topa – Restoring the Kinship Worldview: Indigenous Voices Introduce 28 Precepts for Rebalancing Life on Planet Earth
  • Dahr Jamail, Stan Rushworth – We Are the Middle of Forever: Indigenous Voices from Turtle Island on the Changing Earth
  • Gavin Van Horn, Robin Wall Kimmerer, John Hausdoerffer – Kinship : Belonging to a world of relations

Troisième sous-nébuleuse : héritages de la post-cybernétique et de la nouvelle biologie

  • William Connolly – The Fragility of Things et/ou Facing the Planetary
  • adrienne maree brown – Emergent Strategy
  • Dorian Sagan et Lynn Margulis – Microcosmos – 4 milliards d’années de symbiose terrestre
  • Catherine Keller – Entangled Worlds : Religion, science, and new materialism

Pour celles et ceux qui ne savent que participer en virtuel, nous créons aussi une liste d’intéressé·e·s, et ouvrirons éventuellement un espace virtuel à partir d’avril !

Pour toutes questions ou pour vous inscrire, envoyez un mail à delphine@mycelium.cc